Jan Karski de Yannick Haenel

Publié le par delivresetdeaufraiche.over-blog.com

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J’avais suivi de loin la polémique ayant fait rage entre écrivains et historiens, et entre historiens tout court, qui avait beaucoup fait parler de cet ouvrage au moment de sa sortie.

J’avais pour ma part avant tout gardé en tête le sujet de cette biographie romancée : le résistant que fut Jan Karski, personnage historique mais méconnu, jeune homme lettré qui s’engage dans la Résistance polonaise de manière quasi-instinctive afin de tenter de sauver la civilisation humaniste qui l’a façonné. Ses rencontres au sein du mouvement résistant, les nécessités du moment et ses qualités personnelles le conduisent à devenir le messager de la résistance polonaise auprès du gouvernement en exil à Londres, puis auprès des Alliés.

Après avoir vu l’annihilation de l’humanité lors d’une incursion dans le ghetto de Varsovie, avoir connu la torture et s’être introduit au sein d’un camp de la mort, il n’aura cesse de vouloir faire savoir au monde l’indicible qu’est la volonté d’extermination nazie, de lui faire vivre la nausée qu’il a lui-même ressenti et qui ne le quitte plus depuis. Il va se heurter tantôt à l’incrédulité, tantôt à l’incompréhension ou à la volonté de se préserver de ses auditeurs, mais toujours à un silence qui semble incommensurable.

 

La première partie du roman est une retranscription quasi-mécanique et très détaillée du témoignage de Yan Karski dans Shoah, le film de Claude Lanzmann. Elle m’a semblé très abrupte au démarrage. Je n’ai tout d’abord pas compris l’intérêt d’une telle retranscription tant toute dimension littéraire me semblait avoir déserté ces pages… C’est en passant à la deuxième partie, la biographie « historique » du héros éponyme, et plus encore à la troisième partie, qui donne à lire ces mêmes faits sous la forme d’un roman, que j’ai saisi tout l’intérêt de cette variation autour de la construction fictive autour du réel, à travers l’art en général et la littérature en particulier.

 

Un beau roman, intéressant par son sujet, par sa construction littéraire, et surtout par la question qu’il pose brillamment  et dont on ne peut se défaire : Pourquoi ? Pourquoi ce silence assourdissant face au cri de l’indicible ? Pourquoi, tout simplement ?

 

Gallimard, collection L’Infini, septembre 2009

 

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A
<br /> Un roman très fort, en effet. Même si j'ai trouvé que la polémique était passé à côté de la vraie question que pose le livre.<br /> <br /> <br />
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D
<br /> <br /> Oui, j'ai trouvé aussi !! Si la vie du personnage m'a passionnée, j'ai trouvé que la vraie question de ce livre était la construction fictive autour d'un réel... Et je trouve que le roman<br /> effleure juste les questions, sans y apporter des réponses (mais y en a-t-il ?)... J'ai aimé que ce livre fasse se poser des questions, car longtemps après l'avoir lu j'y repense souvent.<br /> <br /> <br /> <br />